Dossier retraite
Les propositions détaillées de la CGT
Mettre l’emploi en priorité
Le financement des retraites est avant tout compromis par l’insuffisance du nombre d’actifs au travail, par la relative stagnation des salaires et par la précarisation croissante des emplois. Précarité qui détruit en même temps le niveau des droits des salariés et le potentiel de ressources.
Nous savons (travaux du COR) qu’un taux de chômage ramené des plus de 9 % actuels à 4,5 % en 2020 réduirait de moitié les besoins de financement à cette date.
L’articulation travail/salaire/emploi qui était au cœur du dispositif de Sécurité sociale mis en place après la seconde guerre mondiale a été cassée. La CGT propose de rétablir ce lien entre le revenu et la croissance, à travers un emploi stable, qualifié et correctement rémunéré, pour toute la population active, grâce à la mise en place d’un nouveau système de droits sociaux, composante d’une sécurité sociale professionnelle.
Il n’est plus possible de se satisfaire d’un modèle où l’entreprise n’utilise le salarié qu’entre 30 et 50 ans au motif qu’avant et après sa productivité est insuffisante !
Par ailleurs et dans le cadre de ses propositions de réforme du financement, la CGT met l’emploi en priorité : chaque mesure concernant le financement doit être conçue pour favoriser l’emploi.
L’allongement de la durée de vie doit rester un progrès
L’allongement de la durée de vie est une réalité. Faut-il, en conséquence, reculer sans cesse l’âge de la retraite, comme l’ont décidé les auteurs de la réforme de 2010 et comme cela est inscrit dans la loi Fillon de 2003 ? Autrement dit, faut-il les laisser gérer ce progrès humain comme s’il s’agissait d’une calamité ?
Dans les faits, les mesures de report d’âge, comme celles allongeant la durée d’assurance, aboutissent avant tout à diminuer le niveau des retraites.
Face à l’allongement de la durée de vie, il est nécessaire d’augmenter la durée d’activité moyenne des salariés. Cela peut être obtenu non pas en allongeant la durée de cotisation, mais en cherchant à diminuer les périodes de non activité avant 60 ans.
Il s’agit de favoriser l’intégration des jeunes, de limiter les mises à l’écart anticipées des salariés âgés, de prendre en compte les périodes de formation, d’offrir aux salariés à temps partiel la possibilité de passer au temps plein.
Au-delà, il est nécessaire de considérer que les retraités ne sont pas une charge, mais qu’ils contribuent à une politique de développement collectif au travers d’une multiplicité d’activités le plus souvent bénévoles. Si cela n’entre pas dans le calcul du Produit Intérieur Brut, cela est néanmoins indispensable.
Prévoir des financements pérennes
Il est indispensable d’élargir les bases de financement des régimes. Il s’agit de faire correspondre les modalités de contribution au financement des retraites d’une part et les besoins à couvrir d’autre part. Il faut également sortir des politiques d’exonération de cotisations « patronales » qui coûtent aujourd’hui plus de 30 milliards par an aux finances publiques. Ces politiques aboutissent à la situation suivante : plus l’entreprise réduit ses effectifs et ses salaires, plus elle réduit ses contributions aux régimes sociaux.
Dans ce but, la CGT propose une réforme en profondeur du financement du système de retraite. Cette réforme permettrait de dégager des ressources nouvelles. Elle comporte quatre volets.
- Transformer la contribution patronale sur la base d’une modulation des cotisations favorisera une gestion priorisant l’emploi et le niveau des salaires. 10 milliards d’euros au moins pourraient ainsi revenir aux régimes de retraites.
- Elargir l’assiette des cotisations pour la retraite à tous les éléments de rémunération, primes, intéressement, participation. Selon la Cour des comptes, 120 milliards d’€ de rémunération échappent aujourd’hui, totalement ou partiellement, aux cotisations sociales. Cela représente 9 à 10 milliards d’euros de ressources immédiates et, à plus long terme, des droits supplémentaires pour les salariés.
- Mettre les revenus financiers des entreprises à contribution, au moins à hauteur des cotisations des salariés. Il s’agit d’instaurer un prélèvement spécifique pour les sociétés qui perçoivent, bon an mal an, 250 milliards de revenus financiers.
Ce sont, chaque année, 20 milliards de ressources supplémentaires qui pourraient être affectées au financement des retraites.
- Si ces mesures nouvelles s’avéraient insuffisantes à terme, une augmentation des cotisations dites « patronales » pourrait être envisagée dans un premier temps.
Remarquons qu’il n’y a pas eu de hausse des cotisations depuis 20 ans alors que le nombre de retraités a augmenté d’un tiers.
Un socle commun de garanties pour tous
La CGT récuse l’alignement par le bas entre régime général, fonctionnaires et régimes spéciaux. Elle formule, au contraire, un ensemble de propositions cohérentes, destinées à être mises en œuvre dans chacun des régimes. Si les mises en œuvre peuvent être différentes à l’intérieur des régimes existant actuellement, les objectifs doivent être parfaitement communs, afin que les droits soient réellement identiques. Ces droits sont partie intégrante d’un socle commun à tous les régimes.
- Garantir la possibilité de prendre sa retraite à 60 ans.
Le choix du moment du départ à la retraite doit être préservé, ce choix doit redevenir ouvert à partir de 60 ans, chacun(e) restant libre de sa décision de poursuivre son activité.
Tout l’équilibre du système par répartition est construit à partir de cet âge de 60 ans.
Compte tenu de l’entrée plus tardive dans la vie active, des difficultés des jeunes à trouver un premier emploi et des aléas de carrière plus nombreux aujourd’hui qu’hier, la concrétisation de cet objectif exige de nouvelles modalités d’acquisition des droits à la retraite qui doivent prendre en compte les années d’études et les périodes de précarité subies. Cela suppose de redéfinir ce qu’est une carrière complète.
- Assurer un niveau de pension d’au moins 75 % du revenu net d’activité pour une carrière complète.
Cet objectif doit concerner tous les régimes, du public comme du privé.
Pour le secteur privé, il intègre donc le régime de base et les régimes complémentaires. Pour y parvenir, la CGT propose de revoir le mode de calcul pour le régime général et de revenir :
♦ d’une part à la moyenne des dix meilleures années pour le calcul du salaire de référence (au lieu des vingt cinq meilleures années aujourd’hui) et,
♦ d’autre part, à l’indexation du salaire annuel moyen sur les salaires et non plus sur les prix (le maintien de l’indexation sur les prix a déjà réduit le taux de remplacement de 50 % du régime général à un peu plus de 40 % en réalité aujourd’hui !)
Nos propositions de financement intègrent ces objectifs.
- Elever les minima de pension au niveau du Smic
La CGT propose que la pension de retraite, quelque soit le régime, ne soit pas inférieure au Smic net pour une carrière complète. La notion de « minimum » appliquée au salaire d’activité doit être maintenue pour le salarié en retraite.
- Indexer les pensions sur les salaires et non plus sur les prix.
L’indexation sur les prix a produit, sur les vingt dernières années, un décrochage de l’ordre de 20 % du niveau des pensions par rapport aux salaires.
La CGT propose de revenir à l’indexation des pensions sur l’évolution des salaires.C’est indispensable pour conserver le niveau du taux de remplacement fixé au moment du départ.
C’est indispensable si l’on veut que les retraités, en même temps que l’ensemble de la population, puissent profiter d’un minimum de retour des fruits de la croissance.
- Des départs anticipés pour pénibilité.
Les salariés ayant effectué des travaux pénibles voient leur espérance de vie sérieusement diminuée, l’écart entre ouvriers et cadres supérieurs est aujourd’hui de sept ans en moyenne.
Pour réparer cette injustice, les salariés assujettis à des travaux pénibles doivent bénéficier d’un départ à la retraite anticipé –c’est-à-dire avant soixante ans– en fonction de la durée d’exposition à la pénibilité.
Coordonner les régimes pour garantir les droits et assurer la solidarité
Ce que veulent les salariés, c’est avant tout savoir où ils en sont dans l’acquisition de leurs droits et être certains de percevoir la pension qui correspond à ces droits, c’est-à-dire être assurés du niveau de pension qu’ils auront relativement à leur niveau de salaire. Autrement dit, ils veulent le retour à un véritable système à prestations définies.
Pour parvenir à la réalisation, dans chacun des régimes, des droits que revendique la CGT et qui doivent être communs à tous, nous proposons l’édification d’une maison commune des régimes de retraite.
Elle aurait pour rôle de solidariser l’ensemble des régimes de salariés au lieu de les opposer, afin de promouvoir, dans chacun d’eux et dans une parfaite transparence d’ensemble, le socle commun de garanties évoqué précédemment.